PRESIDENTIELLE DE NOVEMBRE 2010
Officiellement et peut-être définitivement, six candidats feront face à Blaise Compaoré, donné super favori du premier tour du scrutin présidentiel prévu au Burkina le 21 novembre prochain. Des huit candidatures examinées par le Conseil constitutionnel, une seule a été rejetée : celle de Harouna Dicko, dirigeant d’un petit parti, le RPN, qui a été recalé pour n’avoir pas réuni toutes les conditions requises. Il lui est loisible de faire appel même s’il a très peu de chance d’émerger du lot. Après plusieurs mandats à la tête du Burkina, l’actuel chef de l’Etat va encore tenter de se succéder à lui-même. Il bénéficie du soutien du parti au pouvoir, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), des formations politiques de la mouvance présidentielle, de l’ADF-RDA et de la FEDAP-BC. Bien huilée, la machine électorale du pouvoir peut compter sur le concours de la FEDAP-BC qui rassemble tous ceux qui disent s’affranchir de la politique politicienne pour épauler le chef de l’Etat dans ses actions.
Pour l’heure, le spectacle est peu réjouissant : en dépit des tractations menées tout au long de l’année pour faire bloc autour d’une seule candidature, l’opposition se présente en rangs dispersés et presque sans ressources. Certes, l’on a ressenti un certain soulagement, et même un réel espoir à l’annonce de la candidature de Hama Arba Diallo. Celle-ci étant venue sur le tard, il appartient toutefois aux progressistes de faire la preuve qu’ils sont capables de se retrouver et de se réorganiser pour remporter la victoire.
Sur la liste des opposants figure Me Bénéwendé Stanislas Sankara, actuel chef de fil e de l’opposition. Il avait obtenu un score d’un peu plus de 5% des suffrages exprimés lors du scrutin présidentiel de 2005. A la tête d’un parti se réclamant des idéaux de Thomas Sankara, le légendaire chef de la Révolution burkinabè assassiné en 1987, cet avocat de formation bénéficie du soutien d’une coalition de partis d’obédience sankariste. D’autres sankaristes ont rejoint le camp progressiste et ont fait alliance autour de la candidature de Hama Arba Diallo, lui-même ancien chef de la diplomatie sous la Révolution. Maire de la ville de Dori et député du Sahel, cet ancien haut fonctionnaire des Nations unies est un vieux militant du Parti africain de l’indépendance (PAI). Dans le courant sankariste, figure également Boukary Kaboré dit le Lion du Boulkiemdé. Il est connu pour avoir tenté en vain de mener la contre-offensive lors du renversement et de l’assassinat de Thomas Sankara en octobre 1987. Ce scrutin permettra de situer le poids de l’homme dans l’opinion.
François Kaboré et Emile Paré, sont deux anciens membres du parti de feu profe s s eur Joseph Ki-Zerbo. Avec leur mésentente, ils feront la part belle à l’adversaire commun. Enfin, Maxime Kaboré est le seul candidat indépendant. Pour avoir longtemps résidé en Europe, la Belgique en particulier, il est de tous les candidats celui que les Burkinabè connaissent à peine. Du lot, Harouna Dicko est finalement le seul à avoir été recalé. On doutait d’ailleurs de sa capacité à mobiliser du monde, car il n’a pas fait grand bruit autour de sa candidature. Déjà, il avait eu le mérite de déc
eler des couacs dans les textes de loi lors du scrutin de 2005. Il n’aura malheureusement pas su exploiter l’opportunité que cela offrait à sa personne et à son parti, en termes de visibilité et de stratégie politique. Avec sa pléthore de candidats, l’opposition burkinabè ne part pas avec les faveurs des pronostics. Certains candidats brillent par leur manque de visibilité ou leurs incohérences. L’organisation générale, la structuration et le fonctionnement des partis laissent à désirer dans bien des cas. Sans oublier le manque de ressources qui hypothèque les chances.
Au-delà des sempiternelles bagarres entre opposition et majorité présidentielle, il sera bien plus intéressant de savoir comment dans l’opposition les électeurs trancheront entre deux personnalités de proue : Hama Arba Diallo et Me Sankara. Me Sankara fera-t-il mieux que son score au scrutin présidentiel de 2005 ? Réussira-t-il, au-delà du discours, à convaincre l’électorat qu’il est bel et bien le véritable chef de file de l’opposition ? Quel sera le poids réel de Hama Arba Diallo dans l’électorat ? Pour celui qui a su conquérir les suffrages des citoyens au plan local et régional, ce scrutin apparaît comme un vrai test de popularité au plan national. Cette présidentielle reste n éanmoins sans enjeu pour beaucoup de Burkinabè. Pour nombre d’analystes, le terrain est miné par les caciques du CDP, après plus d’une vingtaine d’années au pouvoir. La réélection de Blaise Compaoré apparaît plus que probable pour beaucoup. Mais vu les expériences politiques et électorales à travers le m onde, il ne faut jurer de rien.
Source: Le Pays