Le problème est devenu grave
OUAGADOUGOU, 22 avril 2010 (IRIN) - Les conflits entre les éleveurs et les fermiers du Burkina Faso menacent de déborder dans les pays voisins à l’heure où les éleveurs burkinabés se déplacent en quête de pâturages, a prévenu le gouvernement.
« La compétition pour l’obtention de terres, de plus en plus rares, va entraîner la migration des éleveurs et de leur bétail vers les pays voisins, ce qui augmente le risque de conflits transfrontaliers », a dit à IRIN Tanga Guissou, directeur des espaces et aménagements pastoraux au ministère des Ressources animales.
Soixante pour cent des éleveurs du centre-sud du Burkina Faso vivent actuellement au Ghana, selon Hassan Barry, président d’une association d’éleveurs de la province de Zoumwéogo.
« Le problème est devenu grave », a dit Salam Kaboré, directeur de l’agriculture, originaire de la province de Nahouri, dans le sud. « Auparavant, il y avait assez de terres pour que les fermiers et les éleveurs puissent mener leurs activités côte à côte. Aujourd’hui, il n’y a pas assez de place et [des fermiers venus d’autres régions] occupent les pâturages réservés au bétail ».
Vingt-neuf cas de dommages fonciers causés par des animaux ont été recensés en 2009, à Nahouri. Malgré les efforts déployés par les autorités en vue d’encourager les fermiers et les éleveurs à travailler ensemble dans la paix, des conflits continuent d’éclater « ici et là », a expliqué M. Kaboré.
Dans le sud, les conflits entre les fermiers et les éleveurs ont fait 18 morts et un nombre indéterminé de blessés, depuis 2007, dans les provinces de Gogo, Perkoura, Zounwéogo et Poni.
Le risque de conflits va en outre augmenter au Burkina Faso et dans les pays voisins avec la diminution prévue de la production agricole et du fourrage, selon M. Guissou du ministère des Ressources animales.
Les précipitations erratiques de 2009, observées au Burkina Faso et dans les pays désertiques voisins, ont en effet réduit les récoltes de jusque 30 pour cent.
Les projets d’irrigation et la détérioration des terres qui a incité les agriculteurs à se disperser en quête de terres cultivables, réduisent les terres pastorales de trois pour cent par an, selon le ministère des Ressources animales.
Pas de droits fonciers
Les communautés – en particulier celles du sud - qui n’ont pas de droits de propriété foncière officiels ont été expulsées par les projets d’irrigation hydro-agricole et les migrants originaires d’autres régions du pays, qui ont formé des communautés agricoles sédentaires, a dit M. Guissou à IRIN. « Les groupes [autochtones] sont souvent livrés à leurs propres ressources dans le cadre des processus [de développement] et des efforts ne sont pas systématiquement fournis en vue de les y faire participer, ce qui les frustre et provoque des conflits ».
Les éleveurs ainsi expulsés de leurs terres sont contraints de partir plus loin au-delà des frontières pour trouver des pâturages convenables, a ajouté M. Guissou. « Dans le sud, les pâturages d’hier sont devenus les projets hydro-agricoles d’aujourd’hui, où l’on ne tient pas compte des éleveurs », a dit à IRIN le directeur du ministère des Ressources animales.
Le pays compte huit millions de vaches et 19 millions d’autres animaux d’élevage de plus petite taille. A la suite des sécheresses des années 1970, le gouvernement a désigné 185 zones pastorales couvrant une superficie de deux millions d’hectares, soit plus d’un million d’hectares de moins qu’il en faudrait actuellement, selon M. Guissou.
«Nos méthodes d’élevage et d’agriculture restent traditionnelles et exigent une vaste superficie de terres. Depuis la sécheresse des années 1970, et avec le changement climatique [actuel], il y a de plus en plus d’humains et d’animaux sur un espace limité et avec des ressources limitées », a-t-il ajouté.
Pour minimiser les risques de conflits entre les fermiers et les éleveurs, le ministère des Ressources animales a présenté un plan tenant compte des habitudes de migration des éleveurs et des besoins des animaux en eau, mais le gouvernement n’a pu réunir qu’une petite partie des millions de dollars nécessaires pour financer ce plan, a déploré M. Guissou.
Source : www.irinnews.org