Le colis encombrant venu de Rabat
Certaines rumeurs le disaient en partance pour l’Espagne, ou éventuellement pour Conakry. Mais c’est finalement à Ouagadougou que Moussa Dadis Camara, chef de la junte au pouvoir en Guinée, poursuivra sa convalescence. L’annonce en a été faite par un bref communiqué de presse du ministère des Affaires étrangères.
C’est aux alentours de 22 heures que le King Air marocain transportant le capitaine Moussa Dadis Camara a foulé le tarmac de l’aéroport militaire de Ouagadougou. Selon le correspondant de RFI, c’est un homme vêtu d’un manteau recouvert d’un blouson et portant des verres correcteurs qui a mis le pied sur l’une des passerelles de la base aérienne 511. Soutenu par deux hommes, il marchait difficilement. Pas de tapis rouge, encore moins de fanfare pour le rescapé de la tentative d’assassinat du 3 décembre, accompagné d’un médecin et d’un garde du corps guinéens ainsi que de médecins marocains. Moussa Dadis Camara a été accueilli à sa descente d’avion par Alain Yoda, le ministre des Affaires étrangères, et quelques proches du président.
Peu après son arrivée, le capitaine Camara aurait eu une vive discussion avec ses accompagnateurs marocains. On apprendra plus tard qu’il était surpris de se retrouver à Ouaga, alors qu’il s’attendait à rentrer au pays. Il faut dire que, côté burkinabè aussi, on a été pris de court. C’est en effet en début de soirée que le départ de Rabat de Moussa Dadis Camara pour Ouagadougou a été annoncé. La veille, un coup de fil du roi du Maroc aurait demandé à Blaise Compaoré, médiateur dans la crise guinéenne, de recevoir le convalescent. Ce dernier lui aurait répondu qu’il étudierait la question. Précaution sans doute inutile, car le plan de vol pour le Pays des hommes intègres semblait déjà tracé.
Installé dans une des nombreuses villas de Ouaga 2000, le chef du CNDD aurait déjà reçu la visite de son hôte burkinabè. On annonçait hier l’arrivée, en provenance de Conakry, du général Sékouba Konaté, ministre de la Défense et chef de l’Etat par intérim.
Indexé par le rapport des Nations unies sur les événements du 28-Septembre, Moussa Dadis Camara entame une convalescence aux allures d’exil. On se demande s’il va demeurer à Ouagadougou ou s’il s’agira d’une simple escale avant une autre destination. Mais ce qui est sûr, c’est que son retour en Guinée n’est pas pour tout de suite. Déjà, le 22 décembre dernier, Bernard Kouchner avait déclaré que le pays risquait de sombrer dans la guerre civile si le capitaine rentrait. Un point de vue partagé par le département d’Etat américain qui, lui, se dit « préoccupé » par une quelconque velléité de retour de Moussa Dadis Camara dans sa patrie.
A quelques jours du début de l’enquête du procureur adjoint de la Cour pénale internationale (CPI) pour situer les responsabilités de Dadis et de ses coaccusés dans les massacres et les viols du 28 septembre, on peut légitimement se demander si cette convalescence se déroulera dans le calme et la sérénité, ainsi que le souhaitent les médecins.